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Démystifier les vices cachés



Vous cherchez à comprendre ce qu’est un vice caché? Vous aimeriez connaître les conditions pour entamer un recours en justice? Cet article est pour vous : il traitera de la notion de vice caché, de ses conditions d’existence et des étapes à respecter avant d’entamer un recours judiciaire.

Qu'est-ce qu’un vice caché ?

La loi définit le vice caché comme étant un défaut (1) rendant l’immeuble impropre à l’usage auquel on le destine ou (2) diminuant tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté ou n’aurait pas donné un si haut prix s’il en avait connu l’existence[1].

Quand est-on en présence d’un vice caché?

Il existe quatre conditions à réunir pour qu’un vice soit qualifié de « vice caché » :

  1. Le vice a un caractère occulte, caché : un acheteur prudent et diligent, sans devoir faire appel aux services d’un expert, ne serait pas en mesure de découvrir le vice au moment de la vente.

  2. Le vice est méconnu de l’acquéreur : le vice ne doit pas être connu par l’acheteur au moment de la vente.

  3. Le vice est important ou grave : un vice qui diminue de peu la valeur de l’immeuble ou qui nécessite de minimes coûts de réparation ne pourrait se qualifier de vice caché.

  4. Le vice existe au moment de l’achat de l’immeuble : si le vice nait après l’acquisition, il ne s’agit pas d’un vice caché.

Existe-t-il une protection contre les vices cachés?

La loi prévoit une protection légale en matière de vente contre les vices cachés : il s’agit de la garantie légale de la qualité du bien[2], prévue au Code civil du Québec. Cette garantie légale est prévue par défaut dans la loi. Cependant, les parties contractantes qui souhaitent se soustraire totalement ou partiellement à cette protection doivent le faire par contrat[3]. Si vous avez consenti à une vente sans garantie légale, nous vous invitons à consulter notre publication intitulée Vente immobilière sans garantie légale : un recours possible?

Est-ce nécessaire de faire appel à un expert au moment de l’achat?

Légalement, il n’est pas obligatoire de faire appel à un expert ou d’obtenir un rapport d’inspection préachat avant d’acquérir un immeuble[4]. En revanche, le défaut de faire appel à un expert en cas de soupçon de présence de vices cachés au moment de la vente peut être considéré comme un manquement au devoir de prudence et de diligence de l’acheteur[5]. Ainsi, un acheteur doit faire un examen attentif de l’immeuble, mais n’a pas l’obligation de faire des examens invasifs tels que, par exemple, ouvrir les murs d’une pièce pour en vérifier les composantes internes. Cependant, si la visite de l’immeuble soulève des indices de problématiques potentielles, l’acquéreur devra procéder à une inspection plus approfondie ou encore recourir aux services d’un expert avant l’achat.

Une fois le vice découvert, que doit-on faire?

Dès la découverte du vice, l’acheteur doit le dénoncer par écrit au vendeur. Cette dénonciation doit se faire dans un délai raisonnable[6], qui ne devrait pas dépasser six mois[7]. Cependant, ce délai ne s’applique pas si le vendeur avait connaissance du vice au moment de la vente et n’en avait pas informé l’acheteur[8]. La dénonciation est une condition impérative à la mise en œuvre de la garantie légale : le défaut du vendeur de dénoncer sera généralement fatal à une demande en justice pour récupérer les coûts de réparations[9].

L’acheteur doit également, avant d’entreprendre tout recours, transmettre une mise en demeure laissant au vendeur l’opportunité de constater le vice et de le réparer à ses frais dans un certain délai donné[10].

La dénonciation et la mise en demeure diffèrent par leur objectif. En effet, si la dénonciation informe du vice le vendeur et l’invite à y donner suite, la mise en demeure fait bien plus qu’inviter : elle exige du vendeur qu’il exécute ses obligations en offrant la réparation du vice. Cependant, malgré leurs différences, rien n’empêche qu’un même document constitue à la fois une dénonciation et une mise en demeure extrajudiciaire[11].

Quels sont les recours qui s’offrent à l’acheteur?

Qu’arrive-t-il lorsque l’acheteur floué par un vice caché se heurte au refus du vendeur de l’indemniser ou d’effectuer les travaux correctifs? Heureusement, l’acheteur n’est pas sans moyens! Il pourra entreprendre un recours devant les tribunaux civils pour demander soit la diminution du prix de vente, soit l’annulation de la vente elle-même.

Cependant, il est important de mentionner que la réduction du prix de vente ne correspond pas automatiquement aux coûts des travaux correctifs. D’autres facteurs devraient être pris en compte dans la détermination de la compensation demandée, notamment la plus-value engendrée par de tels travaux sur la valeur de l’immeuble ou encore l’âge de la bâtisse[12].


Conseil du jour : Si vous décidez de retenir les services d’un inspecteur en bâtiment ou d’un expert avant d’acheter une propriété, il est recommandé de vérifier si ce professionnel d’expertise est couvert par une assurance-responsabilité.


Les informations présentées ci-dessus ne constituent qu’un outil de référence sur les développements récents du droit. Cet article ne constitue pas un avis juridique et ne comporte aucune garantie relative à votre dossier. Nous vous recommandons fortement de recourir aux conseils juridiques d’un avocat, membre en règle du Barreau du Québec.


 

[1] Article 1726 al. 1 C.c.Q. [2] Id. [3] Article 1732 C.c.Q. [4] Gagnon c. Leduc, 2017 QCCQ 11494. [5] Id. [6] Article 1739 al. 1 C.c.Q. [7] Aviva, compagnie d'assurances du Canada c. Hanjra, 2020 QCCQ 2436, par 95, citant Jeffrey EDWARDS, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2008, n° 489, p. 236. [8] Article 1739 al. 2 C.c.Q. [9] Claude Joyal inc. c. CNH Canada Ltd., 2014 QCCA 588, par 31 ; Immeubles de l'Estuaire phase III inc. c. Syndicat des copropriétaires de l'Estuaire Condo phase III, 2006 QCCA 781. [10] Article 1590 C.c.Q. [11] Claude Joyal inc. c. CNH Canada Ltd., 2014 QCCA 588, par 44, citant Jean-Louis BAUDOIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les obligations, 7e éd., par Pierre-Gabriel JOBIN et Nathalie VÉZINA, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, par. 701. [12] Beaumier c. Proulx, 2021 QCCQ 1755.

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